Opus 67.8.8
daigne angle saigne maillons de peau je tire le masque qui te cache le visage je vois ta pensée
je vois un film porno je vois des yeux cousus aux joues et les oreilles écoutent les moignons des morts qui cognent aux parois des cercueils de peau transparents
tandis que j’agonise
la lèvre abîmée
et le sang donné plus que bu
orbe
valeur
tièdedechattesachequejenesuispasmoi
sachequetumedégoûtescommejemedégoûtemoi-même
autant qu’à toi
aime-moi
à toi donne mamelle d’où sort un sang salé
je découpe ta cervelle en rondelles
je te mange bout par bout
les mains collées aux yeux qui voient dans la nuit ce qui sort des tunnels de chiure
donne moi ta membrane
toi l’indocile
donnedonnedonnecricrèvecrevassecricrèvecri
mais voilà
sur l’écran de ciné les images se décollent comme des poignées de pluie rance
au cours des affiches anciennes
sur l’écran de ton cul
plaqué dans mon crâne amolli
ma langue lèche la paroi invisible de tes entrailles retournées à l’envers
Opus 45.3.11
voilà
ma vie est pleine de morceaux de viande avariée
le ciel tracé d’un trait
l’horizon circulaire
on a peur
les morts dansent sur la tête
dans le grand cimetière où l’on se retrouve pour prier
tu as incendié le silence
tu le regardes brûler de loin
tu es incontinent
tu te pisses sur toi-même
tu te retrouves couvert de sang
tu prends une plaie entre tes doigts
elle parle toute seule
les ombres marchent à quatre pattes
et imitent les aboiements des chiens
j’ai moi-même une tête de chien
je prends le soleil dans ma gueule
et j’en arrache tous les rayons
je te prends par la main
et j’en retire tes doigts un à un
te voilà devenue moignon
nous ne nous parlons plus
nos langues sont cousues à nos lèvres
et nos lèvres sont tuméfiées
les mots perdent leur substance
et deviennent fragiles comme du verre
ils se brisent au contact de la pensée
on tourne en rond dans le noir
comme des insectes prisonniers
de la lumière d’une lampe
ton corps couverts de graffitis
tu entres dans l’eau tiède de la mer
il y a autour de toi des familles alanguies
des enfants jouent dans l’eau en criant
des hommes musclés vont et viennent
des jeunes femmes exhibent leurs corps
c’était hier
c’était non loin du centre ville
mais le temps tiré comme une balle de fusil
vient se loger dans ton crâne
mais j’ai déjà tout oublié
je dois recommencer ma vie
mais entre-temps mon corps a vieilli
je ne peux plus revenir sur mes pas
les ombres escaladent les murailles
et s’en vont danser dans les rues
j’entends ton rire dans mon cerveau
j’entends ta voix dans mon silence
et pourtant je ne t’entends plus