EXTRAITS DE INSOMNIES

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 Crédit photographique : © Charlotte Santana

 
 

 

Extraits de Insomnies, 

 

Lentement

la lumière du matin

redessine au sol

les lattes des persiennes.

 

Nous cachons nos yeux

dans les replis des draps

et retrouvons un sommeil

de molle fatigue.

 

Nos corps assoupis

entre parenthèses,

(une pause)

et le temps en attente.

 

Matinée de fin de semaine,

les heures défilent interminables

et j’entends ton sourire,

me vient l’envie imbécile

de conjuguer l’amour.

 

Et toi tu me regardes

avec tendresse

et, tandis que ta main

caresse mon visage

et souligne mes contours,

avec tendresse encore

tu prononces deux simples mots.

Je pars.

 

*

 

La nuit en ville n'est jamais silencieuse.

 

L'obscurité est habitée par la chaudière qui claque,

l'eau chaude qui circule jusqu'aux radiateurs,

l'air de la ventilation mécanique contrôlée,

le ronron du réfrigérateur,

le roulis des voitures dans la rue,

des cris et des rires,

sorties de boîtes de nuit,

ivresse du soir ou du petit matin.

 

Et même lorsque tout s'arrête,

lorsque les moteurs font une pause

et les buveurs sont endormis,

même lorsque je me dis enfin

qu'il n'y a plus un seul bruit,

demeure tout de même un souffle,

une respiration,

une vibration de l'air

différente de celle de la campagne.

 

La ville grésille comme un néon,

elle est vivante

et son cœur bat dans la nuit.

 

Insomnie.

Et tes deux mots qui résonnent,

absurdes.

 

*

 

Désormais ton absence

et ton corps hors du lit.

 

Ta voix qui me réveille

toujours à la même heure

malgré le décalage.

 

Ton appel

quand tu penses à moi,

quand la mélancolie t’enveloppe

et que tu composes les chiffres

qui te relient à mon sommeil.

 

Tu es parti.

 

Traversé l’océan

croyant que je viendrais te rejoindre.

Divisé le monde en tranches verticales,

nous sommes de part et d’autre

d’une frontière invisible

et c’est ainsi.

 

Tu m'appelles chaque nuit

pour que je cesse de dormir

sur ce fuseau horaire,

pour que je m’habitue

à te rejoindre.

 

Mais je ne viendrai pas.

 

 

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